Passé de l’autre coté de la barre
poudreuse de rouge
le chemin d’ocre
ou le pole
aussi haut qu’il semble possible
avant de tomberLa pluie et la brume
ça et là des amas de matière
brumes noirs coulées blanches
ces accès du monde où l’écriture transpire
des laves épargnéesCe sont des iles
l’ordinaire de l’humidité
ça et là
la suie où ça n’a pas séché
des embruns dégagent la calvitie
de l’ombre
muette sur la lettre
saturé le papier l’est
ce que j’aime dans cette endroit c’est la possibilité d’avoir la tête couverte par la brume et l’orage
du haut de la promenade trempée de noir et les gris des tessitures enveloppent l’herbe où l’encre investit
creuse en fines lamelles rejoignant les fibres les plis et les accrocs des trombes de pluie finissent en rigoles taillant dans le dessin
c’est l’aléatoire des précipitations qui me séduit
ce n’est pas bien différent d’un ciel surchargé d’humidité ou vacant la forme des nuages est une tache sur la lumière
rien d’autre, et qu’est-ce la pluie ? une occurrence de la sensibilité, une saturation de pression sur l’œil
la main prend les relais et froisse en hâte
il faut lire des poils ou crins de chevaux tracent sur le végétal ou la peau rugueuse du coton pressé un chemin issu de l’eau et de la suie
par ces moyen l’âme oppressée se libère et rejoint l’anéantissement ophtalmique
Ombre
Si l’ombre n’est pas cette bienfaisance et l’abri de la lumière
Considérée comme telle
crue et diaphane
morsure de la lumière
Le corps lui même pénétré abandonnant toute densité
Comme une larve sous le corps de la terre et y cédant ; une cellule espaçant les points de l’incarnation jusqu’à devenir lueur disparaissant quoique lumière mise à nu caressante serait elle violence et fatigue ?
Toute trace d’ombre est en soi
un repos
non une limite mais
une permission
une possibilité
dans le sens le plus fort de pouvoir
même caché
se reconnaitre comme corps
Lustre un verre
pétale irisé
luxe évanescent
insaisissable
Comme un grain aspiré par l’entourant

La matière un recueillement
une manière de faire alliance avec le temps
portant en soi
le silence
les traces
l’irradiant
à cette ombre
comme une substance intérieure
étant ombre
non par rapport
mais en soi
Magnifiant le réel auquel il renvoie
Ramené en contradiction
dans l’obscur au vif allusif

à l’ombre des mousses
mais si boire à la source nous vient du ciel
boire dévale la fraicheur de l’aplomb
l’arythmie facile est démentie par le chapeau
la montagne n’est pas à grimper
mais la vapeur qui bruisse sous le couvercle
ruades dans les creux
l’ombre étouffe
le choc des certitudes
le vertige en taches
crissement du végétal
y parvient le vide
sans qu’il y ait de débord
roucoulent et saouls
les lignes éparses
sérénité ombrée
des plis du moineau
encre aire

elles me semblaient retenir le sens caché de la féminité,
le sens profond dont les œuvres sont les remontées
Barbara Hepworth résumait sa philosophie de son art dans ces mots :
« significant form » le sens à même la forme ,

moi au Yale center for british art j’allais tous les jours dessiner et tenter de mieux cerner le sens et sa relation avec la forme
sous-jacent est le sens qui détermine, mais mêlé à l’œuvre, de sorte que le monde matériel et le sens sont mêlés, du moins leur expression ;
l’après midi j’allais à la bibliothèque dévorer les livres s’y rapportant ,
une période intense
est-ce charger la peinture d’une intentionnalité et d’un sens au cœur de l’abstrait ?
Moi je peignais avec énergie et intention, projetant dans l’opacité le sens caché, qui seul véhiculait une vérité, cachée elle aussi,
l’intention, l’attention tout autant présente, et il est sûr que la poésie dans les êtres et le sens, même impalpable, est une des choses les plus fortes que l’art ou la peinture puissent toucher
dont il n’est que la pythie
il l’annonce
mais faut il le vouloir ? le geste lourd de conséquences ?
le vide et l’espace et l’énergie du trait se substituent à la forme et même lui préexiste
l’intention poétique,
mais sans bien comprendre pourquoi
et pourquoi y être attaché ?
attacher sa vie à un trait c’est y accorder beaucoup d’importance
beaucoup trop

le geste et la présence de la main pèsent beaucoup trop lourd sur le papier pour se prévaloir de faire surgir un sens,
autre que celui porté par la vie de ce corps et l’esprit
on ne le comprends qu’après avoir bataillé
le souffle de Michel Doneda et l’intuition et l’envie de la sérénité, me font légèrement convier l’encre dans l’eau du papier, j’entrevois cette légèreté pour l’aquarelle
je me sépare du trait ou de la tache qui affirme , pesamment
ce n’est pas de tenter d’être spirituel , c’est ne plus porter l’oreille aux bruits de l’intérieur qui me poussent à rivaliser avec le monde, d’une voix égale ,
se laisser porter ,
confier à la brise, sans qu’il n’y ait d’importance ni d’enjeu,
une mise en place simple, dans le corps du monde, de quelques épines ou aiguilles
attouchements, étreinte quand même s’il en faut
la poésie étant partout, la laisser se déposer
et l’aider d’un geste qui accompagne
l’envie se fait de plus en plus précise et j’attends le corps porté d’énergie à recueillir sur la feuille
l’esprit a envie de jouer
il n’oublie pas que le monde est diversité mais qu’il ne pèse pas plus qu’une plume
et comme de boire de l’eau le ciel en est plein
- habité de l’intention le corps écoute