c’est entre les seins

céramique de wilfredo Lam

c’est entre les seins que jute le kaki,  une voyelle est tombée de l’arbre, de la raie  la feuille plane dans la poussière et la caravane passe, cela ne fait guère de sens et pourtant la trace avance de manière si soudaine que

souvent l’envie des mots arrive et se déchaine avec l’arrivée d’un seul, d’une image, d’une sensation , d’une pensée,

l’important c’est l’ébullition, mais parfois les mots qui arrivent à l’improviste se heurtent, cette généalogie peut ne pas présenter d’intérêt mais elle éclaire sur la psychologie du quotidien, indique aussi et c’est important que les mots ne sont pas placés là par gout de l’effet et de l’envie d’écrire quelque chose de joli

l’entourloupe est complète et les vendeurs à la criée des feuilles volantes font des poèmes cirés vernis, des récit de toute la crasse qui stagne et se mêle à la tienne pendant qu’au creux du bois dans la clairière monte un cri d’oiseau ou un bêlement de chèvre, l’assurance que quelque chose s’est réveillé

mais ça la grosse meringue montée en neige

non !

le cœur humain se fie au bouchon

ce qui est intéressant c’est  la pèche à la ligne, d’attendre que le bouchon soit agité par quelque chose de tangible, de vrai, poisson ou vieille chaussure, paquet d’algue ou est-ce’ un cadavre jeté là il y a longtemps , on ne sait pas ce qu’il y a dessous, mais on ne sait que si peu ce qui se passe que ce soit en dessus ou en dessous, ou où que ce soit

ce qui remonte nous permet de nous étoffer, de nous tenir droit, de nous retrouver, c’est donc un peu un rite qui re-raconte une vieille histoire le mot surgit,  krik krak ou sirandane kopek, n’importe quel mot, une couleur, une phrase, un modelé de la hanche ou un tissus, un regard qui frôle, ce claquement sur la peau réveille ce qui d’habitude dort dans la chaleur et le froid, reste dans les zones de l’arrière-vie sans se montrer et  laisse aller les vivants vaquer à leur illusions, aux corvées et aux arrangement pour assurer le vivre mais krik et krak et apparaît le mot

pendant que gratte le crin les cordes du violon

mais on sait bien que recouvert par nos hâtes insipides auxquelles nous ne croyons pas    , nos vies à la traîne,  ne sont que les restes de ce qui est bien vivant mais qu’il faut réveiller à chaque fois, nos êtres, une couche de poussière, convenances cris attentats recouvrent une rivière magique, en nous courent  sans qu’on y prête attention, toutes sortes d’élans, lumières d’histoires et vagues d’émotions et au dela même, comme la mer immense ou le ciel sans forme, l’être humain qui ne demande qu’à se déplier et sortir de l’armoire, pourquoi des armoires si ce n’est pour faire croire au carrés alors que c’est de musiQUES que nos os hantent, qui le soir s’évadent des turpitudes, enflent et d’un cri apaisant nous relie au plus haut sens de l’esprit qui dans le le corps s’incarne et s’enflamme

et c’est pour cela que nous attendons le mots, ou d’être prêt à s’en saisir, le déclic, ce peut être n’importe quoi, deux mains qui claquent et c’est l’histoire qui se déroule dans les plis des lèvres enfin libérées et le corps qui mime, la main qui s’agite, le pinceau, le tambour ou la caresse

se met à parler et se remémore ce qu’il ne sait pas encore,

car finalement cette cérémonie cèle le pacte de joie, le  vivre vivant circule entre deux peaux, resplendit dans le feu et les yeux percent et fait se perler la bouche qui intarissable et l’œil malin n’en finit pas de dire enfin ce que c’est que

de faire enfin taire le silence

mais l’homme sait qu’il lui faut retourner quelque chose en lui, sans trop savoir quoi et il fait appel à un mot,  une fibrille, zébrage, brisée, murmure, fourbis, tout ce dire qui s’accumule, un claquement de langue

et la vie sait que sans danger elle peut se dérouler,

douce

frénétique

vraie,

enfin sur le bout de la langue et au rythme des hanches

le réel libéré l’auditoire répond heureux de l’heure de la joie, choeur, choros ou répons, écho indispensable à la parole

c’est sur eux que sont braqués les yeux à travers celui qui parle, défile et coud le fil

mais les fauteurs de troubles, les prétentieux,  les envieux et ceux qui croient au destin suprême de l’ordonnancement rationnel des mots,  à la sémantique des couleurs, ceux-la prennent ombrage et claquent tout seul la porte, disparaissent entre les murs et se tapissent sous les tables, tournent à toutes vitesse les pages des livres à la recherche du verbe sacré par lequel tout à commencé, qui régit le souffle de toute chose et ne prête pas attention au courant d’air qui déchire les feuillets, mélangent les lettres de l’alphabet recréant une langue d’avant qui te ressemble

bien sur il y a un ordonnancement mais s’il ne se recommande pas de l’invisible il n’est guère crédible, s’il émane d’une bienséance, poète de la fierté tu parles une langue comme une cravate toutes rentrée en boule dans la bouche, gesticulation attentive il veut s’assurer que la soirée soit bien le prolongement du monde de la journée,

mais ça ne nous intéresse pas ;

Fiona Foley

l’homme fatigué de la journée qu’il n’a pas convié se fie à ce mot hasardeux qui le libérera du miroir que lui tend le monde, il regarde vaguement inquiet, secoue ses os et crie krik krak ou un truc comme ça jusqu’à ce que les os et la chair vieille tombent par terre et il voit l’histoire s’élancer et comme un gosse il s’en amuse, est terrifié ou se réjouit, content d’avoir encore un fois vaincu le monde enclume que le jour lui tendait et que l’on donnait vainqueur à 100 contre un ,

lui a été visité par le mot et le grand voyage à commencé

il a vu ce mur pluvieux qui porte les traces de la pluie et des coups de butoir du soleil

il a vu le graph du zèbre

il a vu la fille et le popotin magique,  les lèvres qui lui promettent, croit il, les plus belles bouchées et s’en ai régalé d’avance

il a été traversé par un mot et s’est souvenu d’un poème , aujourd’hui, ça été les deux en même temps et il a plongé, il a fait la chasse aux virgules et les a mis dans un sac et un moment,  il a su que c’est là que se cache sa vie ou dans les grands moments de rire ou quand il partage avec tous quand  il se jette à l’eau et que la grande marée l’emporte,

il s’est vu qui  chantent tous ensemble convoquant à l’aide du mot qui leur promet que cela recommencera et que ça n’a jamais cessé. et ne cessera pas.

Publié par Lamber Savi

Défiance créative: peindre, écrire, traduire, simplement suivre les bulles du courant http://about.me/lsavigneux

5 commentaires sur « c’est entre les seins »

  1. très beau. ça me ramène à quelques scènes du film « dialogue avec mon jardinier » qui est est un de mes films préférés.

  2. je ne l’ai pas vu ou pas en entier , avec Daniel Auteuil c’est ça ? oui j’aime beaucoup aussi , celui qui se croit peintre et redécouvre la vie?
    merci de ta lecture généreuse !

  3. de rien. Ma lecture à crû , pas généreuse, vraie.. je te livre mes émotions à chaud à la lecture. Oui avec Auteuil et Darroussin qui lui explique la vie et sa saveur.

    1. Et justement, en te lisant, j’ai fait cette « variation »…

      ‘ taire le silence »

      Si j’apprends à taire le silence
      En jetant quelques cailloux dans l’eau
      Alors, la surface remue, et se souvient
      En cercles concentriques, des éclaboussures
      Et des gestes ténus,
      Qui repoussent quelques secondes la léthargie,
      En laissant une place à la vie.
      Mon geste n’est plus là, mais seulement sa trace
      Comme lorsque je passe un doigt distrait
      Sur la couche de poussière recouvrant le buffet.

      J’apprends à lire, les instants fugitifs,
      Le murmure de histoire, et l’invisible est crédible
      Les brioches dorées, le zeste des parfums,
      Le sillage d’un regard, au détour d’un reflet,
      Le souffle des choses, agitant les feuillets
      Les chapitres du bonheur, que révèle
      Un pinceau de lumière à travers les nuées
      Eloignées des étoiles, et dénuées
      De l’ombre – qui fait l’importance.

      Si j’apprends à taire le silence,
      C’est pour mieux traduire
      Une langue d’avant qui te ressemble
      La prolongation d’une grâce
      Que n’offrent ni les mots
      Ni la parole rhétorique,
      Les doigts ouverts de l’invisible
      Quand ils te dessinent à mes yeux:
      Une veine qui palpite à ton front,
      Et la courbe d’une hanche…

      J’apprends à lire, les instants fugitifs,
      A rassembler les indices,
      Peut-être à inventer,
      A rajouter des brillances
      Et des couleurs de voix,
      Imiter rivières et cascades,
      Et l’ombre des collines
      Qui dessine des courbes
      Sur le désir de l’instant
      Que les lèvres promettent.

      RC – 6 octobre 2012

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