Et moi tout seul
tu le sais
si bien
je n’ai
jamais dansé
antant
que quand ma tête
en transe
chantait l’absence
des chemins
au goût olive
§
Enfin rien sauf un peu d’eau
rides cils en faux – cils de l’oubli
robe syllabes de nuages
toges de vents humides
les gosses
inondent
les arcades
nuées
ondulant de frissons
leurs têtes surgissent
sans passion
de la terre
entre leur mémoire
et demain
la faim tresse
le fil boueux de notre parole
où aller bon sang
cacher cette honte
infinie
dans la chute des temps
©Chehem Watta, Cahiers de brouillon des poèmes du désert, L’Harmattan
Chehem Watta, poète de Djibouti, issu d’une famille de pasteurs qui nomadisent encore entre l’Ethiopie et Djibouti, semble maintenir cette tradition dans l’écriture, la modernité l’ayant entrainé sur d’autre voies (les études supérieures et l’administration) l’écriture comme un brouillon, fragmentaire, au sens noble du mot, dans ces contrées où le vent relativise l’homme, soumet son pas au sable, le rappel de la terre, il semble nier Rimbaud et pourtant le poursuivre, comme s’il fallait résoudre une contradiction, un affrontement. Ces poèmes me semble autant de moments arrachés ou dispersés, aux vents, à la roche, à l’homme et sa survie, la femme et l’enfant, l’avancée millénaire et la nécessaire soumission, rêve de liberté, écho des lointains, misère obstinément rendue.
le cahier de brouillon est comme tracé sur le sable, entre le geste des ancêtres et une tentative de rejoindre la modernité, la joindre?