le livre qui n’est pas un livre
ne se trouve pas sur l’étagère
ne se trouve pas dans le carton
ne sort pas des camions de l’imprimeur
ne sert pas à allumer le feu
n’est pas une image glamour
glisse comme une luge
flotte sur le déluge
reluque les greluches
est le cauchemar des politiques
au feu rouge détournant la conversation
sous les pneus crissants des truands
dans un parc même la nuit
le livre se trouve dans une poche
se tourne du bout des doigts
se pousse dans ta main
s’ouvre en creux dans ta bouche
élégant ovale de tes mots
se glisse dans ton sommeil
déflagre dans tes rêves
déclenche l’humeur dans ta pensée
défrise les crépus
divulgue les horaires
se rencontre en chemin
croise et décroise les affinités
s’oppose à la hiérarchie
avant l’heure
nu sous son imper
se mêle aux chansons
diffuse des films
cale le lit
en équilibre sur la tête
n’est pas une pipe
mais n’évite pas les migraines
orages et dents creuses
flottant le long de l’accalmie
gonflée de l’eau des typhons
absent des villes
peuple les espaces verts
refleurie
certifié sans OGM
beugle
appelle la tempête
ou du moins le départ
et pas qu’en train
se situe aux intersections
déplié porte aux vents
ce sont des oiseaux
l’envergure de la pensée ailée
voyagent en concorde
laissent un vide
des deux mains serrant les fesses
pète et contrepet
allié
s’en va et s’en vient
tourne et retourne
comme les aiguilles
l’ombre du cadran solaire
les désaxés
jetés à même le papier
d’emballage
des traces de sang protègent du froid
écrivains dangereux
et philosophes hargneux
gibiers de potence
répertoire et agenda
sous le manteau
ce sont des satellites
acariens des galaxies
dunes de sable
dune de vent
dans la salle d’attente
fatigué d’attendre
et du silence
et du désarroi
et du doute
et de l’indifférence
si tout est différent
pulse
oubliettes
que les histoires oublient
love affairs
pourrissent entre les pages
arrachées
déchirées
délavées
abscondes
sans pub
abstinentes
déportées
d’un mot en aligner dix mille
et pas uns
qui ne veuille rester en place
obéir
acquiéscer
rester parqué
chacun s’imaginant autre
récalcitrant
se prenant pour le tout
et ayant raison
à sa façon
ne renonçant jamais
au grand voyage
contenu en germe
dans le son
la pandémie
fornique
virus propagatoire
ou antidote
anti tout ce que l’on veut et pourtant favorable
à l’éclosion
à l’évidement
et au défilement
si l’on ne peut s’arrêter
ainsi furent conclues les mille nuits
et les nuits blanches sur l’oreiller
de Sei Shonagon
les courtisanes
et les réclusions
je pense au marquis
et au maquis
aux vidéos de Guantanamo
dans le journal
quand la messe est dite
et qu’il n’y a plus d’ostie
que sur l’immeuble sur la 10ème avenue
il pleut
et qu’un homme se penchant
lit
indifférent au traffic
de drogue
ou de la circulation
des idées
des marchandises et des hommes
des identités morts nés
Kaddish la liste des transactions
des destructions
des obstructions
une déflagration
le livre troué sous le manteau
gisant là
la gueule ouverte
et les mots pas morts
continuant
à dégueuler
la même histoire
répétée
jusqu’à conclusion
le dernier chapitre
cousu dans la doublure
que la police recherche
l’écrivain se cache
un microfilm dans un tube de dentifrice
est un livre
en planque
en devenir
manuscrit
le livre recense
encense
défalque
essuie
même si l’on veut
les défaites
de la matière
ou l’épopée
des journées d’un bureaucrate
inattentif
rebelle à sa façon
et déchirant les lignes de compte
glissant un poème
comme un alambic
disant merde à son chef
du moins l’écrivant
en marge des lignes de compte
additionnant
les heures
les minutes
qui le rapprochent de la sortie
de l’abattoir
un veau
rit
souris
d’ans un couloir copule
l’agent de police a le dos tourné
la bête à deux dos buggue
le livre est là
racontant une histoire sans fin
où tout fini autrement
ne fini pas
ne commence pas
disjoncte
établit la nomenclature des espèces en voie d’extinction
dont la mienne
j’ai mis une croix à l’endroit
ai corné la page
déchiré l’image
annoté et colorié
c’est un ticket de train
la porte s’ouvre
je saute
me mets en route
impatient
plein d’espoir
l’oeil qui brille
noir
attendant
les voyant braire
par la fenêtre du train
calant en pleine côte
sachant que
ils comme nous
se rencontrent en chemin
quand on s’y attend le moins
se livre en éclat du regard
et surgissent les écarts de ta plumes
plumes ou pliures
l’envergure se mue en être ailé
prendre ce qui ne se mesure pas
malgré ton ennui
les lettres les mots l’encre laissée sur l’entrevue
il ne te reste plus qu’à écrire